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Audrey Pulvar: "nous ne sommes pas là pour servir la soupe aux politiciens"
Audrey Pulvar, la première journaliste afro-caribéeenne à présenter un journal dans la tranche 19 heures - 20 heures en France, après avoir été la première à co-animer un journal du soir, est revenue avec nous sur sa nomination et ses projets, notamment d'écriture
 27/06/2006 Par Herve Mbouguen
 
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Audrey Pulvar
©Sylvain Legrand / France Télévisions
   
Vous êtes devenue la première femme d'origine caribéenne à devenir présentatrice d'un journal de la tranche 19h-20h comment avez-vous accueilli cette promotion?

Professionnellement c'était une super promotion pour moi, c'est une tranche vraiment très exposée le "19/20" étant le deuxième journal le plus regardé le soir. Professionnellement c'est donc un grand pas pour moi qui m'a fait énormément plaisir, mais en même temps c'est beaucoup de pression, mais j'essaie de relever le défi.

A l'inverse, quel effet cela fait-il à la professionnelle des médias que vous êtes d'être toujours associée à son origine ethnique?

Je trouve cela un peu fatiguant. Ca fera bientôt deux ans que je fais de l'antenne au niveau national, il y a eu d'autres personnes avant moi comme Christine Kelly, même si c'était sur des chaînes du câble et du satellite, je n'étais pas si nouvelle que cela, et je crois qu'il est temps que l'on s'intéresse à nos capacités professionnelles plus qu'à notre couleur de peau.
Je suis beaucoup plus flattée par un article du "Monde" ou d'un autre journal qui parle du fond de mon travail que par 120 ou 200 articles dans d'autres journaux qui mettent en avant le fait que je serais la première femme noire à avoir fait ceci ou cela. Je suis là pour faire mon boulot, je sais très bien qui je suis et d'où je viens, mais je suis d'abord là pour faire mon travail de journaliste.

   

Audrey Pulvar
©Sylvain Legrand / France Télévisions

Justement en parlant de votre travail, la façon dont vous avez notamment accueilli Nicolas Sarkozy dans votre journal n'a pas laissé insensible dans les forums. Comment a réagi votre rédaction à ce traitement inhabituel pour M. Sarkozy ?

La rédaction a très bien réagi même si je regrette avoir donné une impression d'agressivité dans cette interview, parce que ce n'était pas l'objet: j'étais là pour poser des questions, y compris des questions dérangeantes, sans forcément être agressive. Mais je pense avoir interviewé Nicolas Sarkozy comme j'ai récemment interviewé Laurent Fabius, Domininique de Villepin ou Jean-Louis Borloo. Je prépare énormément mes interviews, j'essaie de leur donner un peu de relief. Vous savez, souvent les invités viennent avec une idée précise de ce qu'ils veulent dire et de l'ordre dans lequel ils ont l'intention de le dire. Mais nous ne sommes pas là pour leur servir la soupe, j'ai donc moi aussi une idée très précise des questions que j'ai l'intention de leur poser, et j'essaie donc en général de mener l'interview et non de me laisser mener. Je ne suis pas la seule à le faire, nous sommes très nombreux dans le métier à le faire.

Vous parlez de votre travail, de votre objectivité. Comment arrive-t-on à garder recul et objectivité quand on doit commenter un drame comme celui de la Carribean Airlines dans lequel vous avez peut-être perdu des proches?

Oui j'ai perdu des membres de ma famille dans cette tragédie, mais en l'occurence c'était vraiment de l'information, une tragédie. Les gens comprennent que le présentateur soit ému par les informations qu'il présente, qu'elles concernent sa famille ou pas. Maintenant j'essaie de continuer à faire mon métier. Ce n'est pas la première fois que je suis touché de près par une information, même les choses qui ne me touchent pas personnellement dans ma chair ni dans celle de mes proches ne m'indiffèrent pas: je ne suis pas du tout blasée par rapport aux informations. Je suis en résonnance avec ce dont je parle, et c'est vrai qu'il m'arrive souvent d'être boulversée par les informations que je donne, mais j'essaie de rester dans la mesure du possible de rester professionnelle, de ne pas porter de jugement hâtif ni laisser transparaître mon opinion mais de rester une journaliste professionnelle.

Le premier livre d’Audrey Pulvar
©Amazon
   
Sur le terrain professionnel vous avez cité Christine Kelly dont on parle pour devenir le "joker" de Claire Chazal, le passage d'Harry Roselmack à TF1 a été remarqué, tout comme les dernières commémorations: la France serait-elle en train de rédécouvrir ses "minorités visibles"?

En ce qui concerne la télévision je ne vais pas employer le mot "cynisme" mais je pense que le mot "altruisme" n'existe pas en télévision. Je crois que tout est dit dans cette phrase.

En ce qui concerne les commémorations je ne sais pas si la France redécouvre ses minorités, mais c'est bien qu'elle découvre ou re-découvre une partie de son histoire. Je ne fais pas partie de ceux qui demandent réparations, indemnisations ou repentance, je demande juste à la France de reconnaître son histoire, de l'admettre, de la même façon que nous devons admettre que cela a existé, c'est une façon pour moi de commencer à guérir même si je pense que l'esclavage va être un legs indélébile de générations en générations, mais nous ne sommes pas obligés de nous enfermer dedans, cela peut devenir une force pour avancer.

Je ne fais pas partie de ceux qui veulent mettre la France à genoux.
   

©Sylvain Legrand / France Télévisions

Avez-vous des projets dont vous pouvez nous parler, vous qui devez être très occupée entre vos nouvelles responsabilités et votre vie familiale?

J'ai un deuxième livre en préparation. Je suis en train de l'écrire même s'il me sera difficile de trouver le temps de le terminer.

Quel en sera le thème?

Dans le premier roman il y avait une partie en Martinique, et une partie à Londres. Là ce sera plutôt en Guyane et à Paris. Mais il y a a toujours un appel à la nature et à la communication très forte avec la nature, et en même temps je m'interroge beaucoup sur les relations dans la famille, parce je dis souvent que dans "cellule familiale" il y a "cellule", et je m'interroge beaucoup sur la place de chacun dans la famille et sur la marge entre ce qu'on fait de sa vie pour ne pas subir de reproche de ses enfants, et ce qu'on aimerait en faire.

Et des projets en télévision?

Le 23 Mai en direct et en prime-time à 20h50 une émission sur l'état de la France à un an des présidentielles, avec plusieurs hommes et femmes politiques sur le plateau, et six français dont nous avons suivi la vie pendant trois mois. Il y avait eu un documentaire d'une heure et demie suivi d'un débat d'une heure et demie.
Je présente toujours une émission mensuelle sur La Chaîne Parlementaire, et d'ici les vacances de Juillet l'essentiel sera de réussir le "19/20", d'essayer de continuer à faire du bon boulot.
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Mots-clés: Christine Kelly   
 

   

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