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Celestine Zanou : "pour un Bénin debout"
Le 5 Mars prochain, les Béninois éliront leur nouveau président, ou leur nouvelle présidente. En effet parmi les candidats à la magistrature suprême, il y a deux candidates. L’une d’elles, Céléstine Zanou s’est confié à Grioo lors de son passage Paris fin Janvier.
 21/02/2006 Par Lize Moudouthé
 
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Géographe, agroéconomiste, Célestine Zanou a fait du développement son cheval de bataille. Après des études supérieures au Bénin, elle se spécialise à l’Institut Agronomique Méditerranéen de Montpellier.
Son action au sein de diverses organisations internationales, sa détermination ont attiré l’attention sur elle. Appelée par le ministre du Plan elle mettra ses compétences au service de son pays.
Aujourd’hui elle souhaite continuer sur cette lancée en offrant au Bénin de « retrouver le sens des valeurs ». Peut être future présidente du Bénin, elle n’en est pas moins femme, ni mère et c'est avec simplicité et chaleur qu’elle a répondu aux questions de Grioo.

Celestine Zanou
   
Dans quel cadre êtes vous venue à Paris ?
Je suis venue à Paris d’abord dans le cadre personnel, pour rencontrer ma famille et faire le point avec elle sur ce que j’ai entrepris jusqu’ici. Je suis également venue pour rencontrer des amis d’ici. Discuter avec eux de ce que je suis en train de faire, de la façon dont je pense y arriver.

Il y a une communauté béninoise en France, communauté elle aussi concernée par cette élection. Avez-vous des contacts avec certains de ses membres ?
Tout à fait j’ai prévu quelques rencontres avec mes compatriotes mais selon une approche qui n’est pas du tout celle d’un grand meeting. C’est des gens que j’ai connus, des gens avec qui je partage un certain nombre de convictions, comme la valorisation de la ressource humaine, ce que j'ai toujours prôné. Ce sont ces personnes que je vais rencontrer.

Des rencontres prévues avec des politiques français ?
C’est prévu. Il y en a qui ont on souhaité me rencontrer

Pouvez- vous revenir pour les grioonautes sur les grandes lignes de votre parcours?

J’ai effectué diverses missions pour des organisations internationales l’IDEP, la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), au Club du Sahel, à la Conférence des Ministres de l’Agriculture des pays de l’Afrique de l’Ouest et à la FAO de 1989 à 1995. En 1996, j’ai été appelée par Albert Tévoédjrè pour être sa Directrice de cabinet, au ministère du Plan, de la Restructuration économique et de l’Emploi.

Parmi mes actions au ministère du Plan j’ai eu à gérer des privatisations d’entreprises mais j’ai surtout accompli un travail de réforme. J’ai mis en place un programme de développement commun qui par la suite sera repris par l’action gouvernementale. Une de mes principales tâches au ministère du Plan aura été l’organisation de la première conférence économique nationale. Le président lui-même (Mathieu Kerekou Ndlr) a remarqué, puisqu’il était impliqué dans la conférence, la méthode que j’avais mise en place. Donc le président m’a remarqué, il est passé par les gens qu’il fallait, il a négocié avec mon ministre et je suis partie comme directrice du cabinet du Président de la République. Donc voilà pour mon parcours de technocrate.
   

Celestine Zanou

Quand avez-vous troqué votre costume de technocrate pour celui de politicienne ?

Le changement s’est opéré après cette mission. Parce que j’ai quand même démissionné. Dans la vie il y a des changements des ruptures. La vie c’est une évolution. Comme j’ai l’habitude de le dire, le jour succède à la nuit. Et c’est ça qui fait aussi l’évolution c’est ça qui fait la dynamique. Donc j’ai démissionné du poste de directrice de cabinet du président de la république en 2001. Et je suis retournée à mes vieux meubles, les organisations internationales.

C’est dans ce créneau là que je me suis retrouvée à traiter de la crise ivoirienne en Côte d’Ivoire. Vous voyez je connaissais la sous région du point de vue des possibilités de développement, je connaissais la Côte d’ivoire. Avec les postes que j’ai occupés tant à la Présidence de la République qu’au ministère du Plan, j’ai côtoyé les hommes politiques de la sous région surtout quand j’étais à la Présidence de la République. De fait, j’ai bien connu le contexte ouest-africain donc c’est avec beaucoup de fierté que j’ai coordonné pour le compte des suisses le programme Suisse d’appui au processus de paix en Côte d’ivoire. Programme axé sur la conduite des réformes politiques, sur la concorde entre les hommes politiques pour amorcer une petite réconciliation. Nous avons apporté notre petite contribution à ce qu’on note aujourd’hui comme avancée en Côte d’ivoire. Après cela des hommes politiques de la sous région des amis du Bénin m’on dit :
« Pourquoi pas ? Intéresse-toi à ton pays. » Je crois que le déclic c’est fait à partir de là.

Célestine Zanou
©celestinezanou.net
   
En tant que femme avez vous le sentiment de relever plus d’obstacles que vos collègues masculins dans cet univers politique ?

Je ne crois pas. Je crois que nous sommes avant tout des êtres humains avec nos capacités. J’ai un cœur qui bat à gauche, j’ai un sang qui est de la même couleur que celui des hommes et je ne vois pas pourquoi pas je ne me battrais pas, les obstacles sont partout et il faut se battre pour les surmonter.

Au Bénin les femmes sont actives en politiques ou vous vous sentez un peu isolée ?

Non je ne me sens pas isolée, il y a des femmes actives en politique, la politique ce n’est pas uniquement la magistrature suprême, elle se fait aussi au niveau des législatives, au niveau des élections communales etc. Les femmes se battent, elles ont commencé à oser braver certains tabous et elles méritent d’être soutenues, d’être encouragées et si nous avons la chance d’avoir une femme à la tête de l’Etat je crois qu’elle se battra pour cela, parce que les femmes sont capables.
Dans l’exercice de vos fonctions politiques est-ce que votre féminité vous confère un regard différent sur la vie sur le monde. En tant que femme est-ce que l’on a une touche particulière en politique ?

Tout a fait. Et je crois que c’est à notre avantage. La femme est une mère. Elle est plus sensible à un certain nombre de choses, la vie, la sauvegarde de la vie, les questions de pauvreté, les questions de santé. Je crois que sa nature même de femme, la prédispose à être plus sensible à ces questions. Et je pense que pour l’Afrique, pour le Bénin pour impulser ce développement qui porte essentiellement sur le règlement de ces problèmes et à part le fait qu’il faut former l’Homme sur des valeurs pour porter la gestion de ce quotidien, la femme a un rôle à jouer.
   

Celestine Zanou

Angela Merkel en Allemagne Ellen Sirleaf Johnson au Libéria Michèle Bachelet au Chili, on parle de Ségolène Royal en France et peut être Céléstine Zanou au Bénin ?Il semblerait qu’il y ait comme une synergie mondiale qui permette aux femmes d’accéder à ce qui leur à longtemps été refusé : la magistrature suprême. Vous sentez-vous poussée par cet élan ?

Je pense que l’élan qui me porte c’est d’abord l’expérience dont j’ai parlé. Et cette ambiance que l’on note au niveau international, en Allemagne, au Libéria, au Chili et peut être en France bientôt, ne fait que faire tomber des préjugés. Donc nous ouvrir les voies parce qu’il faut reconnaître qu’il y avait beaucoup de préjugés. Il y en a encore des préjugés sur les femmes, il y en a encore mais c’est la preuve qu’on est en train de reconnaître à la femme cette capacité à gérer les affaires de l’état, à gérer un pays et ce qui me fait plaisir, c’est surtout cela. Et cela nous amène à dire qu’une femme pour être à ce niveau de responsabilité, doit être une femme capable. Il faut être capable, il faut avoir l’expérience, il faut connaître les réalités du terrain. Je crois que ces femmes là y sont arrivées parce qu’elles sont capables, parce qu’elles connaissent les réalités. Et de ce point de vue je crois que j’ai le profil pour y arriver.

La candidature à la présidence de la république après ces expériences humaines, politiques c’était une évidence pour vous ?

Dans une certaine mesure mon parcours peut me prédisposer à cette aventure. J’ai eu un parcours de technicienne j’ai côtoyé le milieu politique. J’ai à cœur le souci de développement pour mon pays. Et je me dis : "pourquoi pas ?" Je crois que j’ai le profil. Et j’ai aussi l’âge pour le faire.

Celestine Zanou
©celestinezanou.net
   
Comment les gens ont réagi à l’annonce de votre candidature à la présidence ? Dans votre entourage personnel dans l’univers politique mais aussi au niveau de l’opinion publique ?

Je crois que pour beaucoup ce fut la surprise. Les hommes politiques que je connais suffisamment, -ce sont des amis- , ont été surpris. Personne ne s’ y attendait. Par contre dans mon entourage, mes amis proches avec qui j’ai pris la décision ne sont pas surpris. Parce que durant ces cinq dernières années, après ma démission de mon poste à la présidence, ils ont tout fait pour que je n’oublie pas ce chemin qui était en train de se tracer et qu’ils étaient prêts à emprunter avec moi. Eux n’ont pas été surpris du tout puisque depuis cinq ans ils y travaillaient. Et ils sont satisfaits maintenant que le déclic s’est fait et que j’ai pris la décision personnelle, parce qu’après tout c’est une décision personnelle. Décision qui fait la joie de mon entourage proche. Concernant les béninois, après avoir assisté à l’émission « Ma part de vérité » le 22 Janvier dernier sur la chaîne privée Golfe Télévision, j’ai le sentiment qu’ils ont quand même bien accueilli ma candidature. Ce que je déplore c’est ce qu’après avoir été directrice du cabinet de la présidence on attend de moi que je m’exprime comme un citoyen ordinaire. Après de telles responsabilités vous avez l’obligation de réserve, il y a des choses que vous ne pouvez pas dire. Donc mes compatriotes qui pensaient ou qui pensent encore que j’ai fait économie de vérité pourront me comprendre : lorsque l’on a été à ce niveau de responsabilités, votre force votre capacité à être homme d’état dépend aussi de votre capacité à faire valoir votre obligation de réserve. Donc Je peux dire qu’il y a un réel enthousiasme des béninois qui me soutiennent.
   

Celestine Zanou
©celestinezanou.net

Vous parlez de décision personnelle, présidente de la république c’est un poste à responsabilités, d’autant plus que le simple fait de poser sa candidature à la présidentielle est un choix irréversible, que l'on soit élu ou non, et d’une certaine manière lourd de conséquences. Ne ressent-on pas une forme d’appréhension lorsque l’on se décide à s’engager, à faire campagne ?

Beaucoup d’appréhension. Je l’ai dit aux amis à tous ceux qui me conseillaient que ce n’est plus le poste de directeur de cabinet d’un chef d’état. J’avais un chef quand j’occupais ce poste. Et si j’arrive à la magistrature suprême je n’ai plus de chef. J’ai Dieu à qui je dois rendre compte, j’ai ma conscience à qui je dois rendre compte mais plus que cela j’ai la vie de tous mes compatriotes entre mes mains l’amélioration de leur quotidien et c’est là une très lourde responsabilité. De fait cette décision de m’engager dans cette campagne pour la présidentielle n’était pas une décision prise à la légère. Il faut réfléchir, il faut mûrir, il faut peser beaucoup de choses avant de prendre cette décision. C’est pour cela que ma décision a été prise assez tard. Les élections auront lieu en mars prochain je me suis décidée assez tard parce que je devais réfléchir, réfléchir et encore réfléchir profondément. C’est ce que j’ai fait.


Et qu’entendez vous apporter aux béninois et aux béninoises ? Quel est le cœur de votre programme ?

Mon programme est basé essentiellement sur ce que j’ai appelé le sens des valeurs. Il faut que j’aide mon pays à retrouver les valeurs qu’il est en train de perdre. Et deuxièmement, il faut que je mette à la disposition de mon pays mon expérience acquise sur les réalités du pays profond. Je connais ce pays. En termes de potentialités et de possibilités de développement. Et je voudrais mettre tout cela au service de mes compatriotes.

Vous l’avez évoqué, une femme c’est parfois une mère c’est parfois aussi une épouse comment arrivez-vous à gérer toutes ces casquettes ?

Je suis fière de le dire aujourd’hui, je raconte toujours comment j’étais dans les brousses du Togo, du Ghana en train de faire mes enquêtes, alors que j'étais enceinte de mon fils et qu’il aurait pu naître à l’extérieur. Le fait d’avoir porté cet enfant n’a pas été un handicap pour moi pour travailler sur le terrain. Au contraire, les gens m’ont vu à l’œuvre à ce moment là. Je me suis battue, mon fils est très fier de moi tout comme je suis fière de cet enfant qui m’honore parce qu’il a travaillé dur. Il a une maman qu’il a vu se battre toujours en mission sur le terrain et il m’a suivie, il était très autonome. Cet enfant fait ma fierté aujourd’hui parce qu’il est en train de se réaliser. Donc je peux dire que ma casquette de mère je l’ai portée.

Celle d’épouse aussi, même si j’ai refais ma vie, j’ai quand même une famille. Je suis avec un homme qui me soutient qui m’accompagne et c’est très important pour une femme. C’est cela qui peut vous aider si vous avez des ambitions. Si vous voulez réussir sur le plan professionnel et que vous n’avez pas à vos côtés quelqu’un qui vous soutient je crois que c’est un problème. J’ai cette chance aujourd’hui. J’ai des amis qui m’aiment, qui me poussent, qui m’encouragent et cela aussi participe au bonheur que je vis aujourd’hui et qui me comble.

Célestine Zanou
©celestinezanou.net
   
Célestine Zanou quel message souhaitez- vous adresser aux grioonautes ?

Il faut faire confiance aux femmes, mes sœurs ayez confiance en vous. L’excellence ce n’est pas seulement l’intelligentsia, l’excellence c’est la couturière, c’est aussi la vendeuse au bord de la route quelque soit votre niveau mettez tout en œuvre pour être compétente. Quand vous êtes compétente on reconnaît votre valeur je crois que tous ces postes que j’ai occupés depuis Dakar, tous ces postes que j’ai occupés en tant que consultante pour la FAO, tous les postes occupés au niveau politique tant au ministère du Plan qu’à la Présidence de la République je les ai eu sur la base de mes compétences. Je crois en l’efficacité, mes sœurs n’ont qu’à croire en l’efficacité c’est la seule voie de salut.

Ensuite je voudrais dire aux femmes qu’être sur le devant de la scène, être dans le milieu politique, ne devrait enlever en rien notre nature de femme. Nous devons continuer à être femme parce que c’est notre nature de femme qui fera que nous serons sensibles à certaines questions de la vie quotidienne. La santé, l’alimentation, la sécurité des personnes, en un mot la vie pour que nos vies et nos valeurs valent mieux que les profits que l’on peut retirer des fonctions occupées. Il n’y a que la femme qui puisse réellement défendre cet idéal Voilà que le message que je pourrais faire passer aux femmes mais aussi aux hommes.


Plus d’infos

Le site officiel de Célestine Zanou
www.celestinezanou.net

Quelques articles
http://www.fraternite-info.com/article.php3?id_article=2956
http://fr.allafrica.com/stories/200601231451.html
http://www.focusafrique.com/benin/jan/23-3.htm
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