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Les beautés noires de Baudelaire, de Elvire Maurouard
La rédaction de votre site est allée à la rencontre d'Elvire Maurouard, enseignante d'origine haïtienne, qui vient de consacrer un livre à Charles Baudelaire, notamment à la façon dont il a traité la beauté noire dans son oeuvre
 11/09/2005 Par Elisabeth Vieyra
 
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Elvire Maurouard
   
Elvire Maurouard, née à Haïti, est docteur es Lettres et professeur de Français en France.

Elle a publié plusieurs livres sur la Femme noire dans le roman Haïtien dont « Noire, métisse, presque Blanche, penser la discrimination intra communautaire », des contes et des poèmes qui célèbrent les héros de l’indépendance tel que « contes des Iles savoureuses », mais aussi sur des sujets plus légers comme les choses heureuses, l’amour, la sensualité dans «Alchimie des rêves ».
« Les Beautés noires de Baudelaire » est une étude, un essai sur l’œuvre de Charles Baudelaire et son traitement de la beauté noire dans les thèmes suivants : esthétique, couleur, inspiration.

IL faut avouer que la lecture de ce livre est très difficile à aborder. D’abord par le style et le vocabulaire utilisé. Mais Elvire Maurouard est avant tout une femme de culture, une femme de passion, qui connaît bien la littérature française, et plus particulièrement l’œuvre de Baudelaire.

Il s’agit dans ce livre de présenter Charles Baudelaire, le fameux poète français et traducteur des œuvres d’Edgar Allan Poe, à travers son admiration pour la beauté exotique des femmes noires qu’il a rencontrées lors de ses voyages de jeune homme et notamment l’une de ses maîtresses parisiennes, l’Haïtienne Jeanne Duval.
C’est en tout cas ce que le titre laisse entendre. Mais cela va bien au-delà de la beauté physique des femmes noires, il s’agit aussi de l’éloge du Noir en tant que couleur et en tant qu’humanité.
   

Le livre d’Elvire Maurouard

« Je souhaitais présenter tout d’abord la femme noire comme un personnage littéraire positif. Habituellement, elle est soit victime, soit un personnage éphémère ou du décor, soit, elle n’existe que par le sexe. Baudelaire a été le premier à la faire exister dans la littérature, à lui donner une beauté profonde au-delà de la consommation sexuelle », dit Elvire Maurouard. « Il a créé l’esthétisme de la femme noire, dans son œuvre, elle n’y est jamais inaccessible, elle séduit artistiquement, elle fait rêver ».

J’ai découvert les œuvres de Baudelaire, comme beaucoup de lycéens français en préparant le bac de français.
J’ai été émue par la beauté, la violence et la passion de ses poèmes. Ils ont été pour moi, adolescente à mi-chemin entre le monde de l’enfance et l’âge adulte, une ouverture sur un monde mystérieux.
Je ressens encore aujourd’hui les sensations visuelles qu’ont évoquées en moi « les Fleurs du Mal » de Baudelaire.

Or, lorsque j’ai vu le titre du livre de Elvire Maurouard, j’imaginais ressentir les mêmes choses. « Les beautés Noires », j’en suis une. Noire, je veux dire. Donc je m’apprêtais à recevoir en quelques sortes les hommages posthumes de Charles Baudelaire.
N’est ce pas flatteur, que de recevoir les hommages d’un homme qui vous a fait rêver dans votre jeunesse ?

Charles Baudelaire
©usc.edu
   
L’auteur nous offre un voyage à travers l’esthétisme de Baudelaire.
La femme noire, la beauté noire, inspire la curiosité, la séduction, l’envoûtement, le désir pour qui à l’âme d’un artiste, d’un esthète, d’un voyageur comme Baudelaire. En effet, il a beaucoup voyagé dans les Iles, en Afrique, en Inde… Exotisme rime avec Erotisme et voyage.

« Je suis partie de la beauté noire pour aller vers la beauté universelle, je parle des femmes et des femmes noires » dit-elle, « je voulais donner une autre dimension à la femme noire en particulier et au noir en général».

La beauté de la femme noire atteint l’universalité, le noir est beauté.

Dans une seconde partie, le livre traite de l’art et de la place de la femme noire chez les peintres. La femme noire est vue en tant que personne mythique, spirituelle.
Elvire Maurouard dresse alors un parallèle entre l’art visuel (peintures), l’art plastique (sculpture) et l’art onirique (poésie), le premier et le second ayant eu une forte influence sur le troisième chez Baudelaire. Esthète, il avait un goût pour la beauté et la sensualité. Critique d’art, il était familier de Manet, Goya, Ingres, Delacroix, … qui lui inspirèrent ses vers sur la beauté, la femme et l’exotisme.

« Dans mon livre, il y a une distance que j’ai volontairement prise pour évoquer des choses dont on ne parle pas. Mon lecteur doit aller à la découverte des « autres » femmes noires. A travers l’œuvre de Baudelaire, je veux faire découvrir une sensualité qui n’a rien de répréhensible, d’érotique. La femme noire et les Noirs, doivent intégrer l’universalité, faire partie des mythes du patrimoine culturel français. Nous devons, il faut, sortir de Senghor…
il était important pour moi d’effectuer un travail « scientifique » pour pouvoir exprimer des choses vraies, mais qui ne sont jamais abordées. Au cours de mes 10 années d’études littéraires, je n’ai jamais entendu parler des femmes noires et des Noirs en général de cette façon. »

   

Précédent livre d’Elvire Maurouard

J’ai découvert ainsi dans ce livre que Baudelaire avait eu des liaisons avec plusieurs femmes noires qui l’inspirèrent plusieurs poèmes, dont Jeanne Duval, celle qui fut sa muse et avec qui il vécut une longue passion tumultueuse.

« Il faut chercher ce que « l’autre », entendons, l’Européen, a pris chez nous. Le Noir n’essaye pas de se voir au miroir de ce que l’Européen lui a pris culturellement, artistiquement, historiquement : c’est perdu. Nous travaillons à perte » dit-elle dans un grand éclat de rire. « Il y a chez certains comme de l’auto-punition ou de la culpabilité. C’est pris, nous n’en sommes plus dignes.

Le propos d’Elvire Maurouard est, par un « effet miroir des sensations visuelles et imaginaires », de nous faire comprendre comment Baudelaire s’est exprimé à travers sa poésie, mais également à travers les peintures et les sculptures dont il faisait la critique ou qu’il admirait. Et à travers tout cela, de nous faire comprendre qui était Baudelaire et qu’elle était sa vision de la « beauté noire ».

« Les beautés noires de Baudelaire » s’adresse à un lecteur familier de peinture, sculpture et de la poésie de Baudelaire.

Comment comprendre le propos de l’auteur ? En allant à la découverte des œuvres qui sont évoquées.

Ce livre est un outil, un prétexte à étendre sa sensibilisation aux arts, à étendre sa culture.
Et c’est bien ce qu’on attend d’un livre, au final, lorsqu’on a décidé de le lire jusqu’au bout.
Personnellement, je vais racheter « les Fleurs du Mal », parce que j’ai égaré le livre qui m’avait accompagné dans mes années lycée. Et sans doute faire un tour au Musée d’Orsay dès que possible.
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