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Franciana Fety Costa, danseuse chorégraphe d’origine guadeloupéenne
Le parcours de cette semaine est celui de [b Franciana Fety Costa], danseuse chorégraphe d’origine guadeloupéenne, fraîchement débarquée dans l’univers de la comédie. Il y a deux semaines, elle se produisait sur scène dans l’opéra [i Le barbier de Séville].
 21/03/2005 Par Karine SK
 
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Franciana Fety Costa
   
Pouvez-vous revenir sur votre parcours ?

Dès l’âge de 9 ans, j’ai commencé à prendre des cours de danse contemporaine, jazz et classique au conservatoire de Bobigny. Mais c’est à l’âge de 15 ans, en découvrant un ballet d’Alvin Alley (chorégraphe américain de renommée internationale) que j’ai décidé de devenir danseuse professionnelle. Et lorsque l’on m’a proposé du travail, j’ai immédiatement arrêté ma formation universitaire en cours, jusqu'à monter ma propre compagnie en 1992.

Aujourd’hui, vous êtes comédienne et étiez en représentation il y a deux semaines…

Oui, j’interprétais le rôle d’une courtisane dans l’opéra Le barbier de Séville de Rossini. La mise en scène était assurée par Jérôme Savary dont j’admire énormément le travail. Nous avons joué à l’Opéra de Massy pendant quelques jours, tout s’est très bien passé.

De danseuse, vous êtes donc devenue actrice, racontez-nous comment cela s’est passé…

En tant que danseuse, je suis passée par différentes étapes de remises en question, de doutes. J’ai aussi chanté, mais malgré les encouragements de mes professeurs et de mon entourage, je n’étais pas vraiment animée de l’envie de devenir chanteuse. Je me suis beaucoup cherchée, pour finalement réaliser que ma place était dans le jeu. Depuis l’enfance, je suis passionnée de cinéma et ai beaucoup d’admiration pour le métier de comédien.
Ensuite, dans la danse, j’ai toujours pensé que le mouvement sans interprétation n’avait pas grand intérêt : le jeu avait donc déjà une place importante pour moi. Et en travaillant comme danseuse, j’ai multiplié les rencontres avec des professionnels du cinéma, du théâtre, et la transition s’est opérée progressivement et très naturellement.
   

Racontez-nous vos premiers pas de comédienne…

Immédiatement, j’ai expérimenté des sensations complètement différentes : toutes les barrières techniques ou physiques rencontrées dans la danse se sont envolées ! Je me suis immédiatement sentie à ma place ! Je dois beaucoup à certaines personnes qui d’entrée ont cru en moi et m’ont donné ma chance, ce qui m’a permis de multiplier les expériences, surtout au théâtre. J’ai fait une apparition dans Le concil d’amour, dans un petit rôle qui demandait énormément d’implication. J’ai également joué dans La jalousie barbouillée de Molière. J’ai aussi apporté ma collaboration à quelques courts-métrages.

Votre véritable rencontre avec le grand public s’est faite sur les planches du théâtre du rond point, dans une pièce d’Hubert Koundé…

En effet, parmi les rencontres que j’ai faites, celle d’avec Hubert Koundé en 2003 reste une des plus déterminantes. Si je n’étais pas prédestinée à ce métier, il s’est malgré tout imposé à moi petit à petit, et la rencontre avec Hubert a été de l’ordre de la révélation pour moi. C’est d’ailleurs à partir de ce moment que j’ai décidé de m’inscrire aux ateliers du studio Pygmalion. J’y apprends énormément, car chaque personne qui arrive est considérée comme acteur à part entière et doit se prendre en charge.
Grâce à ces ateliers, j’ai appris à casser le côté très esthétique de la danse, j’ai développé mon sens de la créativité et de l’autonomie, ce qui m’aide beaucoup, encore aujourd’hui, pour défendre ma place lors des casting. Et depuis, j’ai un agent !

Cyrille Guei, interprète du rôle de Cagoule dans la pièce d'Hubert Koundé
©Enguerand Bernand
   
Revenons sur cette pièce qui vous a révélée…

La pièce s’appelle Cagoule, elle est écrite et mise en scène par Hubert Koundé. C’est l’histoire d’un jeune martiniquais qui sort de prison. Il rencontre Yasmina, de confession musulmane, en tombe amoureux, et voit dans cette union le moteur qui bouleversera sa vie, loin de ses anciennes préoccupations de voyou. Mais rapidement, il est confronté à la barrière de l’intolérance religieuse. C’est une pièce superbe, une expérience extraordinaire pour moi, qui je l’espère se prolongera la saison prochaine. Nous espérons jouer en Guadeloupe…

Le metteur en scène est noir, les acteurs aussi, quel accueil vous a été réservé ?

Le public a répondu à l’appel et il semble que la pièce ait beaucoup plu. En revanche, les professionnels et les média sont venus à notre rencontre plus timidement, mais au final, nous avons eu de très bons retours.

Comment expliquez-vous le manque de réactivité des professionnels ?

D’abord, un Roger Planchon ou un Peter Brook ont une notoriété et une visibilité que n’a pas forcément Hubert Koundé. De ce fait, je pense qu’ils n’ont pas eu la curiosité de s’interroger d’entrée sur les qualités d’écriture, de mise en scène et de jeu. Mais ils ont finalement réalisé cela en venant voir la pièce.
   

La communauté noire est peu représentée dans le cinéma ou le théâtre, alors qu’on sait les acteurs de couleur nombreux. Que cela vous inspire t-il ?

Je suis bien entendu directement concernée par cette question, et trouve extrêmement déroutante l’attitude des agences, même des plus grandes : on y reconnaît mon talent et de la même manière, on me fait clairement comprendre que je n’y ai pas ma place ! Je pense à quelques rasions qui expliqueraient en partie ce problème.
D’abord, la frilosité de certains agents, qui malgré leur force de proposition, hésitent à présenter des acteurs noirs, alors même qu’un nombre considérable de rôles peuvent être joué indépendamment de la couleur de peau.
Je crois aussi que le potentiel de beaucoup d’acteurs noirs fait peur : il y a déjà une concurrence énorme entre acteurs de type occidental, si les rôles étaient distribués équitablement entre blancs et noirs, la concurrence serait d’autant plus rude…

Ne pensez-vous pas que les professionnels noirs doivent eux-mêmes créer les conditions d’accès à cette reconnaissance et à cette visibilité ?

Oui et non… Prenez l’exemple d’Euzane Palcy qui est une réalisatrice reconnue dans le monde entier, et plus spécialement à Hollywood. A plusieurs occasions, elle a tenté de faire exister des films, tout genres confondus, où sont distribués des comédiens de couleurs. Le CNC n’en a subventionné aucun, que ce soit pour le cinéma ou pour la télévision. Je pense donc que nous devons rester dans l’action, mais que sans volonté politique, il est très difficile de faire des choses, à moins d’avoir des moyens financiers énormes…

©Mars Distribution
   
Avec des films comme Neg marron, ne rentre t-on pas dans une nouvelle ère ?

Je ne sais pas s’il s’agit d’une nouvelle ère, mais l’exemple de ce film illustre très bien ce que je pense, à savoir, nous ne devons pas chercher à nous ghettoïser, au contraire, nous devons tenter de travailler main dans la main avec les autres acteurs et professionnels du cinéma et du théâtre. Car travailler avec un Mathieu Kassovitz, comme c’est le cas dans Neg marron, permet d’entrée l’exposition du film. Je pense que nous avons véritablement à gagner en travaillant entre nous, mais main dans la main avec les autres.

Pour finir, quels sont vos projets pour les mois à venir ?

J’ai pas mal de projets en perspective, et je vous tiendrai au courant en temps voulu. Mais je peux déjà vous dire qu’actuellement, j’écris un scénario dans lequel j’ai le premier rôle, avec l’aide précieuse d’Hubert Koundé. L’histoire est inspirée du vécu de ma mère : j’y mets en lumière des problèmes socioculturels dans les Antilles des années 60 et fais spécialement référence à la couleur de la peau qui détermine le statut des gens. Ensuite, j’ai obtenu un rôle dans Paris la métisse, un long métrage composé de plusieurs courts- métrages, produit par Eclat Production. Le film est actuellement en cours de montage.

Les bons plans de Franciana
Théâtre
Douze oiseaux de jeunesse de Tennessee Williams – Théâtre de la Madeleine
Brooklyn boy avec Aïssa Maïga – Théâtre des Champs-Elysées

Livres
No man’s land de Marianne Costa
Les sacrifiés de Laurent Gaudé

Resto
Le Tanina (spécialités berbères) – 14, rue Abel 75012 Paris

Boutique
Le mouton à cinq pattes - 8 rue Saint-Placide 75006 Paris
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