Grioo Pour Elle
 



 
Accueil > De vous à nous > Le blog de la rédaction > Quand Paris Match s’intéresse à la beauté Black
+ Retour au sommaire de la rubrique
     
Quand Paris Match s’intéresse à la beauté Black
Le numéro de Paris Match du 31 Octobre au 7 Novembre consacre un article à la beauté noire. Le titre ? BEAUTE BLACK. Dans un magazine comme celui-là, la démarche à de quoi surprendre. Seulement la lecture du chapeau laisse perplexe. Il semblerait que toutes les femmes noires n’aient qu’une obsession : ressembler à une blanche.
 12/11/2007 Par Lize Moudouthe
 
Envoyer
Imprimer
Réagir

   
C’est sûr en ce moment l’ « ethnique » à le vent en poupe. A tous les niveaux il fait bon d’en parler. En politique via les Rama Yade, Fadela Amara et autres Rachida Dati, la couleur est de bon ton. D’un point de vue marketing, de plus en plus de marques signent avec des égéries noires. Beyonce, Kerry Washington et Noémie Lenoir pour l’Oréal, Pascal Gentil pour Clarins Homme, Thierry Henry chez Hilfiger, Beyonce encore chez Armani…

Si le monde du sport (un peu contraint au vu des performances des athlètes issus des minorités « visibles ») était l’un des précurseurs, la beauté et plus récemment le luxe s’y sont mis.

Et pour cause, les chiffres sont éloquents, les femmes noires dépensent beaucoup plus que les blanches en matière de beauté et ce, même lorsqu’elles ont de tous petits revenus. 274 € contre 41€ selon une enquête réalisée par A-ka, société d’études marketing spécialisée sur le créneau afro caribéen, citée dans l’article.

Oui c’est sûr les femmes noires sont de grosses consommatrices de cosmétiques.

Nos cheveux et notre peaux demandent plus de soins surtout sous les climats tempérés pour lesquels ils n’ont pas été crées.

C’est sûr que certaines femmes se sont crées d’autres besoins. Tissages, extensions défrisage ou pire blanchiment de la peau. Si les premiers relèvent plus de la coquetterie ce dernier est un problème de santé public, trop peu mis en avant.

Il n’est pas question de remettre en question des pratiques esthétiques évidentes. Faites un test. Dans le métro, le bus, la rue, comptez 10 femmes et voyez combien ont les cheveux naturels, combien les ont défrisés et lâchés, combien portent un tissage, une perruque des extensions…

De même, qu’il n’est pas question de tomber dans l’excès inverse, qui serait de dire que la femme noire se doit de porter ses cheveux naturels point final.

Cela dit, il y a quelque chose de gênant dans cet article. Rappelons qu’il s’adresse à un lectorat peu averti, ignorant tout ou presque des habitudes esthétiques des femmes noires.

C’est ce qui est inquiétant. Après lecture du chapeau, « Défriser, lisser, tresser, blanchir (…) obsessions de la clarté, du cheveu lisse, les clichés postcoloniaux on la vie longue », s’il ne va pas au delà, le lecteur de base de Paris Match serait tenté de penser que toutes les femmes noires veulent avoir les cheveux lisses et blanchir leur peau. Il en va de même de l’accroche « Les Caucasiennes veulent bronzer et boucler, les Africaines, blanchir et lisser ».

Déjà, mettre au même niveau défrisage et blanchiment de la peau peut interroger.

De plus, si une grande majorité des femmes se défrisent les cheveux, ce n’est pas forcément pour les mêmes raisons. Il est certain que le passif esclavagiste et colonial à son rôle à jouer dans la démarche. Mais, on peut aujourd’hui raisonnablement dire que le défrisage pour nombre de femmes relève plus d’une pratique esthétique que d’une réelle question identitaire. Idem pour tout ce qui est extensions, tissages et perruques. Nier qu’il existe un problème lié à l’identification, à la définition et aux canons de beauté serait absurde. Seulement basculer dans la généralité et créer des amalgames qui n’ont pas lieu d’être, ne semblent pas être la meilleure démarche pour aborder ce problème.

Car toutes les femmes qui se défrisent ne se décapent pas la peau même si la réciproque pourrait être plus vraie que fausse. Et pour cause ! Se blanchir la peau, au-delà des dégâts causés à l’épiderme, relève d’un réel complexe identitaire encore plus profond que celui de se lisser les cheveux dans le cas où s’en est un.

D’une femme brune qui se décolore en blonde, d’une femme à la peau pâle qui se fait des UV on ne parlera pas de complexe identitaire, juste de coquetterie. Il serait temps d’admettre que la femme noire a une large palette de choix concernant ses cheveux et qu’aujourd’hui elle papillonne allégrement. Il faut aussi rappeler que certains choix esthétiques sont liés à un héritage, à une désinformation ou absence totale d’information. Bref, la question est complexe d’où l’intérêt de l’aborder avec délicatesse et ouverture d’esprit et surtout d’éviter l’écueil des conclusions hâtives.

Autre bémol, pour un article intitulé « Beauté Black », on est quelque peu perplexe, la maquette de la page manque totalement de glamour. Les illustrations sont minimalistes et ne mettent pas du tout en valeur, la beauté noire.

Il faut tout de même souligner les témoignages de professionnels du cheveu et de la peau noire qui apportent du crédit et permettent de nuancer, un chapeau choc mais réducteur. Même si ces derniers, notamment le docteur Khadi Sy Bizet et Kalidjata Maité regrettent le manque de précision dans le rapport de leurs propos. Concernant ceux du Dr Sy Bizet particulièrement qui manquent de justesse médicale. Iman Bowie, ex-mannequin et créatrice d’une ligne de cosmétiques portant son nom est interviewée, en tant que chef d’entreprise mais présentée avant toute chose comme l’ épouse de son célèbre mari, David Bowie en compagnie duquel elle est sur la photo qui illustre l’encart.

Autre bon point, donner la parole à une « accro » du blanchiment qui atteste de la difficulté de décrocher due notamment à un sevrage long et éprouvant.

Parler de beauté noire, oui. Ce serait tellement mieux si il s’agissait en effet de beauté et pas uniquement de pratiques ou dérives certes rattachables à l’univers de la cosmétiques mais assurément pas à celui de la beauté noire.
Envoyer | Imprimer | Réagir (4 réaction(s))
 
Mots-clés: Khadi Bizet   
 

   

Partager sur: Partager sur Google Google   Partager sur Yahoo Yahoo   Partager sur Digg Digg   Partager sur Delicious Delicious  
 






Elles ont participé à la manifestation contre Guerlain Maïmouna Coulibaly parle du film La Vénus Noire