Elles furent amies. Elles se sont connues adolescentes, et leur amitié s'enrichit d'une composante professionnelle lorsqu'Edith connut le succès que l'on sait, et qu'Emelyne Medina Defays devint son attachée de presse, et leur amitié perdura même quand elle cessera d'être son attachée de presse.
Comme beaucoup de gens elle a reçu comme un coup de massue ce 20 Janvier où Edith nous a quittés, et après une période de fort chagrin, elle a décidé de lui rendre un hommage.
Un hommage en images puisque son livre contient un très grand nombre de photos d'Edith dans différentes circonstances et avec différentes personnalités.
Un hommage collectif puisque la famille et les amis d'Edith Lefel l'ont aidée à rassembler les photos présentées dans le livre. Collectif aussi parce que de nombreuses personnalités, artistes et amis ont pris leur plume, pour rendre un hommage écrit à Edith.
En marge d'une séance de dédicace elle a accepté de répondre aux questions de la rédaction.
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"Edith Lefel, une vie" chez Cléon Music ©creonmusic.com |
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Pour ceux qui ne vous connaissent pas, quels furent vos liens avec Edith Lefel?
Edith et moi nous sommes rencontrées à l'âge de 14 ans à l'école, au Collège donc, puis au Lycée, et nous ne nous sommes plus quittées, jusqu'à sa mort. Nous avons eu au début des relations de copines puis ensuite d'attachée de presse, puisque j'ai été son attachée de presse pendant 10 ans, je m'occupais de ses albums, et après c'était une amitié très forte, jusqu'à sa mort.
Qu'est-ce qui vous a poussée à sortir ce livre sur Edith Lefel? Ne craignez-vous pas d'être associée à ceux qui pouvaient être accusés de vouloir tirer profit de sa mort?
Je ne pense pas que certains aient tenté de tirer profit de la mort d'Edith puisque Marylise Ampigny a sorti son livre comme je suis en train de sortir le mien, c'était une très grande amie d'Edith. On l'a fait pour rendre hommage à Edith, pour qu'elle reste une légende.
J'ai eu l'idée de faire ce livre un mois et demi après son décès. Elle a un parcours tellement exceptionnel, c'est une femme que j'adorais tellement que j'ai eu envie de lui rendre cet hommage. Un livre plus album-photo, parce qu'on ne la connaissait pas en dehors de tout ce qui était scène. J'avais vraiment envie de faire un parcours de la naissance jusqu'à ce tragique événement.
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Emelyne Medina Defays ©grioo.com |
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En parlant de photos, un des points marquants du livre est qu'il regorge de photos couvrant quasiment toute la vie d'Edith. Comment vous êtes-vous procurée autant de photos?
J'ai demandé des photos à sa mère, à ses frères qui m'en ont données. Je suis allée chez Edith, on a ouvert ses albums-photos, j'ai choisi des photos. J'avais aussi des photos m’appartenant que j'ai également mises; ses amis, son manager m'ont également donné des photos de son parcours. Il n'a pas été très difficile de trouver ces photos parce que tout le monde était d'accord pour faire cet hommage. Ils ne se rendaient pas vraiment compte de ce que je voulais faire, et quand le livre est sorti, tout le monde a été très surpris, parce que j'ai vraiment mis tout ce que je pouvais, j'ai fait ce livre avec beaucoup d'affection et d'amour pour Edith, mon amie Edith.
Votre livre fourmille de témoignages d'artistes, de journalistes, et de proches d'Edith qui ont pris leur plume pour lui rendre hommage, a-t-il été difficile de les convaincre de participer à votre livre?
Mme Girardin (NDLR: Ministre de l'Outre-Mer) était présente aux obsèques d'Edith, et j'avais vraiment envie qu'elle ouvre ce livre, en faisant la préface. Elle a accepté sans problème. Ensuite j'ai demandé à Daniel Maximin et à d'autres personnes pour les hommages, qui sont des textes que les gens ont écrits eux-mêmes. Il n'y a pas eu de difficultés, même les gens qui ne la connaissaient pas, mais avaient entendu parler d'elle et ont écouté ses chansons n'ont pas posé de problème.
Les témoignages c'est différent, il s’agit d’artistes, de copains, de proches que j'ai interviewés et dont j'ai ensuite retranscrit les propos.
La deuxième partie c'est "La Légende", c'est un texte que j'ai écrit sur le parcours. Le parcours je le connaissais parce qu'on était copines d'école, mais on s'était quittées par la suite. Il a fallu que j'interroge Ronald Rubinel (NDLR ancien compagnon d'Edith Lefel et père de ses jumeaux), ses proches qui m'ont expliqué ce qu'elle faisait pendant ses concerts, et j'ai ensuite retranscrit.
C'est vraiment une biographie, mais artistique...
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Edith Lefel ©edithlefel.com |
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Qu'apprendront sur Edith Lefel les lecteurs de votre livre ?
Ce que j'ai écrit dans "La Légende", c'est vraiment le parcours d'Edith, j'avais envie que les gens sachent où elle est née, comment elle a commencé la musique, ses études, son parcours, ses rencontres, c'est ce que je voulais puisque que les gens ne la connaissaient qu'à travers sa musique. Je voulais également montrer comment elle était avec ses musiciens parce que c'était une femme assez drôle, qui n'arrêtait pas de rigoler. Elle adorait aussi recevoir les gens.
Je voulais montrer que l'image qu'on avait de cette femme était la même dans la vie.
Les témoignages de l'artiste sont encore plus touchants parce que c'est eux qui parlent de l'artiste, et ça ne trompe pas puisqu'il en ressort la même chose que dans "La Légende".
Quel souvenir souhaiteriez-vous que les lecteurs conservent d'elle?
Elle adorait donner, elle aimait les gens, elle aimait son public, et ce qu'elle voulait c'était lui rendre le plus d'amour possible.
Ce que je voudrais qu'on retienne de cette femme est exactement ce que les gens pensaient, une femme très douce. Elle avait gardé son image de princesse parce qu'elle adorait ça, mais elle aimait donner.
Je voudrais que les gens retiennent de cette femme qu'elle a été une grande artiste, une grande chanteuse, pas seulement à travers la musique antillaise, puisqu'elle a fait de la chanson française avec Goldman et d'autres, elle aurait voulu faire une carrière internationale.
C'était notre ambassadrice, c'est ce que je veux que les gens retiennent.
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Emelyne Medina Defays ©grioo.com |
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A l'inverse, quel souvenir d'Edith Lefel conserverez-vous?
Je retiendrai cette femme tellement douce, tellement gentille avec les gens. Je suis persuadé que c'était une sainte sur Terre parce qu'elle n'a jamais montré une faiblesse, même une tristesse, je n'ai jamais vu une tristesse dans son regard. Toujours dans la joie parce qu'elle disait souvent que la vie est tellement courte qu’il ne faut surtout pas la gâcher.
Edith m'a donné une très bonne leçon de son vivant, c'est qu'il ne faut pas perdre de temps.
Pouvez-vous partager avec les grioonautes une anecdote commune, un souvenir particulier, décrit dans votre livre ou non, avec Edith?
J'ai énormément de souvenirs mais c'est vraiment intime. Je me souviens qu'elle adorait qu'on s'arrose avec des tuyaux d'eau, toutes les trois avec Marie Céline Chroné. Elle nous invitait toutes les trois chez elle, et on s'amusait comme des folles! (rires).
Elle adorait faire la cuisine ainsi que son champagne et sa petite cigarette.
Ce que je retiens vraiment c'est sa grande gentillesse. Elle m'a fait partager énormément de choses, notamment en lecture parce qu'elle adorait lire. Elle m'a fait partager des écrivains comme Albert Cohen, Chamoiseau. Elle m'a fait connaître Daniel Maximin, c'est pour cela que j'ai voulu qu'il soit dans le livre parce que c'est quelqu'un qu'elle appréciait beaucoup, ses poèmes, c'est quelqu'un avec qui elle aurait aimé travailler, mais elle n'a pas eu le temps.
Elle adorait la musique, elle adorait la lecture, j'ai beaucoup partagé avec elle ces moments-là.
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Emelyne Medina Defays et notre journaliste ©grioo.com |
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Avez-vous été surprise voire choquée, comme beaucoup d'entre nous, par l'énorme décalage entre l'émotion suscitée dans la communauté afro-antillaise par le décès d'Edith, et le traitement qu'ont réservé les médias français?
Edith était vraiment connue dans la communauté et très peu dans le national, on ne peut pas dire qu'il n'ont rien fait, ils ont fait des choses.
Ils n'étaient pas présents à l'enterrement parce qu'il y avait une foule énorme, beaucoup plus que pour Yves Montand ou d'autres, nous a dit le responsable du cimetière du Père-Lachaise, et je regrette effectivement qu'ils n'aient pas été présents.
Certains médias, comme Michel Drucker ont annoncé son décès et rendu un hommage, il devrait d'ailleurs en rendre un autre prochainement.
La presse communautaire par contre a beaucoup insisté et continue de le faire pour ses ans, puisque ça va bientôt faire un an (NDLR l'interview a été réalisée 3 jours avant le premier anniversaire du décès d'Edith Lefel).
Elle continuera longtemps à vous manquer?
Ah oui, toujours. Je pleure énormément, et je ne fais pas semblant, mais même si je n'ai pas entièrement fait mon deuil, ce livre m'a permis de faire un deuil de cette mort, de cette tristesse.
J'ai vraiment pris conscience du fait qu'elle était décédée le jour où le livre est passé dans cette machine, l'imprimante. Là j'ai beaucoup pleuré, et je me suis dit "elle est partie".
Mais elle est partie physiquement, parce que son âme reste.
Nous vous remercions pour votre disponibilité
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